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Bébé d’Ostéopathe : la culpabilité parentale

 

Léana, 7 jours, vient au cabinet avec ses parents, car elle a beaucoup de coliques et dort très peu.

Elle est née par césarienne programmée du fait d’une présentation en siège. Ce geste est couramment pratiqué par les obstétriciens car il permet d’éviter les risques liés à une naissance avec présentation dystocique du bébé.

Remarque : Une césarienne est une intervention chirurgicale visant à extraire un enfant de l’utérus maternel par incision de la paroi utérine. Le mot « césarienne » dérive du latin caesar qui veut dire enfant né par incision, (du verbe caedere : couper, inciser) d’où viendrait le surnom porté par Jules César (qu’il a hérité d’un de ses ancêtres qui, lui, serait né par césarienne).

La position en siège du fœtus ferme son bassin et son ventre, crée une contrainte sur les intestins et l’estomac qui parfois est refoulé vers le haut, responsable alors d’un reflux gastro-œsophagien. Outre les difficultés digestives, l’enfant peut avoir une pathologie de hanches et se présente toujours en flexion antérieure (penché en avant).

Dans le cas présent, le traitement ostéopathique « démêle » les contraintes tissulaires. Léana se redresse et commence à prendre appuis sur son diaphragme.

Cependant, les questions des parents se font pressantes : « elle n’a pas choisi le moment de sa naissance », « elle n’est pas née normalement », « il lui manque quelque chose de ne pas être passée par les voies naturelles » (sous-entendu, elle n’a pas souffert et ça va lui manquer !)…, « elle s’endort en prenant son repas »….

A ces mots, l’ambiance devient tendue et lourde. Madame Culpabilité fait son entrée, accompagnée de Mr Remord tandis que la Star Colère et ses fans du club des Agacés préparent leur fanfare !

Léana se referme et j’ai la sensation qu’elle se raccroche dans le ventre maternel (d’ailleurs à cet instant, maman touche sa cicatrice qui lui fait mal et papa se gratte la tête !).

Je lis dans son regard et perçoit dans mes mains un appel : « aide-les ! », tandis que le corps de Léana se tourne vers ses Parents, comme pour leur parler.

Le dialogue est de dire que, quelles que soient les circonstances, l’enfant choisit toujours sa date de naissance, l’équipe obstétricale prend toujours les bonnes décisions au bon moment dans le but de protéger la vie de la mère et de l’enfant ainsi que de limiter la souffrance. Les mots atténuent les maux inconscients générés par la souffrance biblique de l’enfantement, etc., etc……

Un dialogue du cœur s’installe.

J’ai l’impression de faire renaître Léana dans la détente et le sourire. Maman n’a plus mal au ventre, Papa ne se prend plus la tête et même plaisante… un ange passe… et Léana, jusqu’alors en position verticale entre mes mains, en profite pour se pencher sur un côté, prend appuis sur son diaphragme, et utilise le contact de mes mains pour effectuer le retournement qu’elle n’a pas fait avant l’accouchement !

Un échange de regard entre nous tous délivre la fin du traitement.

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Le cancer du pêcheur

 

Avertissement : il va de soi que les techniques qui renforcent la puissance d’être aident à la guérison en stimulant la capacité innée du corps à s’auto guérir et qu’elles ne remplacent en aucun cas les protocoles de traitements proposés par les services de santé publique.

 

Voici l’histoire d’une rencontre, un point lumineux dans une vie.

 

C’était il y a quelques années. Je passais les vacances à découvrir les îles de La Madeleine. Ces îles sont un chapelet du bout du monde, perdues au milieu du golf du fleuve Saint Laurent, un petit paradis peuplé essentiellement de pêcheurs de langoustes et d’espadons selon la saison.

L’hiver, les phoques viennent y mettre bas leurs bébés, l’été, quelques touristes se promènent au milieu des maisons en bois colorées du Québec et sur les bords des falaises en terre rouge, ou encore sur les plages tapissées de coquillages.

 

Il est midi, et je marche le long d’une falaise.

Le soleil est au zénith, un vent frais anime la houle du golf et la mer vient caresser la terre rouge. Un banc invite à s’asseoir, face au grand bleu et son écume, face aux terres rouges, face à soi-même.

Les pensées vont et viennent, c’est le temps d’une méditation.

 

Comme toujours en voyage on se croit seul au milieu de nul part, et comme toujours, survient un personnage… venu d’ailleurs.

Un homme, environ 50 ans, passe devant moi, s’arrête un peu plus loin, attend, lui aussi face à la mer.

Il m’observe, semble hésiter, fais demi tour et viens s’asseoir à côté de moi.

Il respecte mon silence un certain temps, puis me demande si je suis en train de méditer ! Car un homme seul face à l’eau et au ciel, ne peut selon lui que méditer…

 

Poliment et avec respect, il s’insère progressivement dans mes pensées, et me raconte sa méditation.

 

Cet homme, pêcheur de langoustes et d’espadons, a développé quelques années auparavant un cancer de la gorge, une forme grave et compliquée. Un traitement médical adéquat fut effectué. D’autres traitements de soutien du corps, type acupuncture ou phytothérapie, furent associés.

La maladie ne guérissait pas. Les plaies chirurgicales s’infectaient. Son état général faiblissait. Un glissement progressif vers une issue fatale semblait inéluctable.

 

C’est alors que cet homme a visité sa vie, et qu’une image a éclairé sa pensée : pendant la pêche, son bateau était toujours accompagné d’une nuée de mouettes et d’albatros. Ces oiseaux précèdent et suivent le bateau pour profiter des poissons que le pêcheur rejette, des déchets alimentaires des repas, des abats des poissons préparés… des poubelles en quelque sorte !

 

Ce qu’il a fait ensuite est merveilleux. Il a médité en se visualisant debout, à la proue de son bateau, face à l’océan. Tous les jours, il a appelé les oiseaux, il a ouvert sa bouche, sa gorge, son corps. Il a offert son mal aux oiseaux.

Il lui est arrivé de méditer ainsi sur son bateau en pleine mer.

Et les oiseaux sont venus au festin ! Chaque jour une nuée de mouettes venait becqueter son mal.

Les plaies du pêcheur ont cicatrisé. Il a guéri et navigue encore sur son bateau.

 

Il me raconte son histoire. Ses yeux pétillent de joie et d’espoir. Sa voie est mélodieuse.

Puis il est parti, continuant sa promenade et me disant qu’on ne se reverrait sans doute jamais ici bas !

Je suis resté ébahi, rempli d’un bonheur rare et précieux. J’espère vous le transmettre aujourd’hui.

Nous étions heureux lui et moi de ce partage. Notre accolade d’adieu fut fraternelle et gorgée de gratitude.

Si vous le croisez un jour, il vous racontera sûrement ce que je lui ai confié.

 

 

 

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Stress et sentiment d’abandon.

Les situations de stress d’un enfant prennent parfois des dimensions dramatiques, c’est le cas de Rémi, 2 ans. Il vient à ma consultation accompagné par ses parents adoptifs.

 

Nous n’avons aucun renseignement sur la naissance ainsi que sur les parents biologiques de Rémi.

Simplement cet enfant décline sa vie de colères en colères et refuse de manger. Il prend donc peu de poids et son développement commence à accuser un certain retard.

 

Son bilan médical et biologique est normal.

 

De façon surprenante pour un enfant de 2 ans, Rémi s’allonge docilement sur la table et se laisse examiner, docilement, et même passivement !

C’est comme si rien ne l’intéresse. Je crois pouvoir commencer un traitement ostéopathique et rien ne se produit pendant un long moment : aucune sensation de blocage, aucun diagnostic de restriction, aucune tension.

 

J’ai toujours retrouvé ce paradoxe chez les enfants abandonnés.

 

Au premier contact, l’enfant ne montre rien si ce n’est son indifférence.

 

J’ai vécu ce paradoxe en traitant les enfants d’un orphelinat au Cambodge. Nous étions trois ostéopathes à travailler, et, à la fin de la première journée de consultation, nous avions tous les trois des bilans ostéopathiques quasi normaux et satisfaisants.

Les enfants défilaient sous nos mains avec un sourire et de grands yeux tristes, nous remerciaient et repartaient.

J’ai décidé alors de reprendre le travail en centrant notre attention uniquement sur les zones émotionnelles du corps.

 

Ce fût une énorme surprise : immédiatement la sensation d’un volume sans forme organisée, avec la consistance d’une pierre (tombale ?), venait entre les mains.

Dans le même instant la respiration de l’enfant devenait superficielle, voire haletante.

 

Le traitement a consisté à contrôler et tenir cette forme jusqu’à ce que la respiration de l’enfant redevienne normale et apaisée, jusqu’à ce que cette densité disparaisse.

Souvent, à la fin du traitement, l’enfant s’endormait.

 

C’est donc cette même expérience qui m’a aidé à traiter Rémi.

Désormais, il réclame lui-même un traitement régulièrement.

Onze ans plus tard, l’approche de la puberté a créé les conditions d’une nouvelle naissance.

Sa souffrance primitive s’est réinstallée.

 

J’ai alors utilisé la verbalisation, tout en conservant le contact entre mes mains et sa tête, comme avec Florent, m’adressant ici directement à Rémi. Je lui ai demandé de me parler de sa naissance.

Son silence interloqué a été accompagné dans mon toucher par la transformation d’une sensation amorphe et dense comme une pierre en celles de tentacules animés.

Puis il a parlé, comme s’il racontait un vieux rêve…

 

Les mouvements paradoxaux sous mes mains se sont arrêtés et Rémi s’est endormi.

Il a demandé les jours suivants à visiter son Pays natal.

 

 

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une naissance déclenchée suivie d’une extraction par forceps.

 

Beaucoup de traitements ressemblent à celui de Florent, décrit précédemment. C’est le cas de Mathilde venue à ma consultation à son 8ème jour avec ses parents pour les mêmes raisons que Florent. Pour Mathilde, la naissance avait été difficile car il avait fallu déclencher les contractions utérines. La dilatation du col s’était faite lentement. Le passage du bébé avait nécessité l’aide d’instruments (forceps) afin de limiter sa souffrance.

Quoiqu’il en soit Mathilde souffre physiquement. La puissance des contractions, la lenteur du passage, l’angoisse de l’entourage, la mettent mal à l’aise. Elle a mal à la tête, au dos, au ventre, respire vite et à l’envers. Donc, elle pleure beaucoup, dort peu, ne trouve pas de position de repos, mange et digère difficilement.

Mathilde cumule deux interventions sur le déroulement de sa naissance : le déclenchement et les forceps.

Le déclenchement (d’autant plus négatif s’il n’y a pas d’indications médicales ou chirurgicales) induit chez l’enfant l’idée que rien ne va, la sensation d’être tout le temps interrompu et contrôlé.

Les forceps induisent un fonctionnement mental du type de « je ne peux pas y arriver par moi-même », et des douleurs de tête, de nuque et des épaules.

(Soyons clair, il n’est pas dans mon propos l’intention de critiquer une attitude et un geste obstétrical ; ce qui a été fait l’a été pour le bien de la mère et de l’enfant ; les forceps leur sauvent la vie ; j’en évoque simplement les conséquences.)

Le traitement paraît simple : il faut compacter les tissus comme pour Florent. Toutefois rien ne fonctionne. Mathilde pleure à chaque fois que je la touche. Elle refuse le traitement. Je sens ses tissus, son corps, se bloquer sous mes mains comme si une armure d’acier la recouvrait et l’envahissait.

C’est alors que j’ai l’idée de changer le décor et le scénario. Quelque chose d’imprévu se passe, il faut créer l’inattendu.

Je propose donc au papa et la maman de Mathilde de s’asseoir côte à côte sur la table de travail et dépose Mathilde dans les bras de sa maman.

L’enfant est ainsi contre le sein de sa mère, baignée d’odeurs rassurantes. Son papa pose sa main sur son dos et lui parle.

Je suis derrière la maman et prends un léger appui contre son dos par l’intermédiaire d’un coussin. Mes mains recouvrent la tête de Mathilde. Elles effleurent à peine les cheveux. Mathilde pleure toujours, elle hoquète.

Ma perception est toujours celle d’une armure en acier, comme si mes mains tenaient fermement cet objet.

Cependant je la touche comme une plume posée sur l’eau. Mathilde se défend toujours tant sa souffrance de naissance est forte………

 

Il a fallu du temps, beaucoup de temps ! Il a fallu tout l’amour des parents de Mathilde pour aider à traverser ce temps. Il a fallu toute ma confiance et ma certitude que sous l’armure, les tissus du corps de Mathilde attendaient cette délivrance.

L’armure représente ici toute la contracture et les blocages de cette naissance, tant sur le plan physique que sur le plan émotionnel.

Elle représente aussi toutes les défenses fabriquées par Mathilde pour arrêter de souffrir.

Enfin, au bout de tout ce temps, Mathilde s’est détendue progressivement, plusieurs profonds soupirs ont calmé ses hoquets et ses pleurs. Elle s’est endormie.

Plus rien ne bougeait. Le temps s’est arrêté. C’était comme lorsque plusieurs personnes sont réunies, discutent, parlent, échangent, jusqu’à l’instant de silence inattendu, imprévu, et que chacun remarque en pensant au fond de lui-même… « Un ange passe » !

Enfin, la respiration de Mathilde devenait calme et sereine ; enfin, je pouvais la toucher sans l’agresser. Elle réclamait le sein de sa mère et pendant son repas, la conversation a permis de mettre des mots sur ce qui s’était passé.

Mathilde a réalisé sa capacité de réaction dans des situations difficiles, et sa confiance en son corps dans ces moments-là. Sa maman a compris qu’elle n’était en rien responsable de tout ce qui était arrivé.

J’ai apprécié ce travail et je remercie les parents de m’avoir ouvert cet espace d’amour pour que le traitement puisse être efficace.

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Le bébé qui refusait sa naissance

Voici l’histoire de Florent venu à ma consultation à son 7ème jour.

Il vient avec son papa et sa maman. Le motif de l’appel est : « pleurs et cris incessants ».

De fait, mis à part les premières 24 heures, Florent est sans arrêt en cris et en pleurs. Le calme revient un peu pendant les repas. Le bilan médical à la maternité est normal.

Devant cet enfant que rien ne console et ne calme, très vite, les parents sont désemparés… les voisins mécontents !

L’appel téléphonique de la maman est un appel au secours, débordant d’angoisse et de désespérance.

 

L’arrivée de Florent au cabinet est remarquée car très bruyante. Bref, cet enfant semble très en colère.

L’examen médical et l’examen ostéopathique ne révèlent aucun problème particulier. Il n’y a pas de contraintes crâniennes pouvant expliquer un mal de tête, tout au plus, une tension dans la nuque et le haut du dos.

Je commence alors un traitement par rapport à cette tension, et, quel que soit la position de mes mains, quel que soit la posture du bébé, rien ne se passe. Florent est toujours pleurant et hurlant.

Il arrive un instant où je commence à penser que je ne vais rien pouvoir faire pour cet enfant.

Je suis assis à califourchon sur ma table de travail, c’est ma position préférée pour traiter les enfants. Florent est dans mes mains, je le porte, une main sous la tête, l’autre sous le bassin. Il me fait face.

Ses parents sont assis à côté. Ils ont un contact permanent avec lui.

C’est alors que je demande à nouveau à la maman de raconter la naissance.

C’est avec une sorte de « cri du ventre » qu’elle répond du tac au tac : « de toutes façons il ne voulait pas venir, il a fallu aller le chercher » !

Instantanément, mes mains ont perçu comme une rétraction des tissus du bébé, comme si Florent avait envie de se recroqueviller. Il entend les paroles de sa maman et sa réponse est faite en langage corporel.

Mes mains ont suivi ce mouvement de rétraction dès sa perception. Elles se sont rapprochées. Très vite, Florent s’est compacté, tassé sur lui-même. Ce mouvement a imposé un demi-tour de telle sorte que le bébé se retrouve collé contre moi, son dos contre mon ventre. Ma main sur sa tête a quasiment rejoint ma main sur son bassin. Autant que les tissus l’autorisent, j’accompagne ce mouvement de compaction.

Au bout de quelques secondes, cet enfant qui criait et pleurait depuis sa naissance, cet enfant inconsolable, s’est tu… et s’est endormi…

Je ne sais combien de temps a duré cet instant d’immobilité. Nous l’appelons en ostéopathie « Still point ». Je sais seulement qu’il fallait attendre et ne rien faire. Je me rappelle le regard du papa et de la maman ; je sais qu’ils ont pleuré de soulagement.

Je ressens toujours une grande émotion lorsque je raconte cette histoire.

Pendant cette période d’immobilité, Florent a résolu sa colère. C’est vrai, il ne voulait pas venir. L’avoir forcé avait déclenché son refus. Sa rage se déversait sur tout ce qui l’entourait.

Avoir accompagné physiquement ses émotions dans une compaction tissulaire lui a permis de trouver une autre respiration. C’est un peu comme s’il se réconciliait avec le monde.

Lorsque cet instant d’immobilité et de calme est arrivé à son terme, j’ai senti entre mes mains l’enfant se détendre complètement, un bras, une jambe, puis les quatre membres se sont relâchés. Florent s’est progressivement réveillé. Il m’a regardé au fond des yeux.

Le traitement était terminé, il pouvait revenir dans les bras de ses parents et accepter sa naissance.

Je crois que cet enfant a beaucoup de caractère. Il est très volontaire et ne mâchera jamais ses mots dans la vie.

Sa croissance sera libre et sans contrainte car le refus d’être né s’est transformé dans l’apaisement d’être accueilli.

 

 

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Les mains

A propos des mains et du toucher

Patrick JOUHAUD

 

Ce texte est dédié avec toute ma gratitude à Bernard, mon grand frère en médecine.

Sa confiance en mes mains et nos échanges du printemps et de l’été 2009 m’ont inspirés. Nos mains se sont assemblées souvent jusqu’à ce que l’horizon de son voyage disparaisse de mon chemin.

 

 

Les mains sont à la fois fortes et fragiles, elles savent se cacher ou s’exposer, prendre donner et supplier. Elles peuvent trancher, arracher, elles frappent et caressent. Elles sont douées d’une incroyable habileté, de capacités insoupçonnées. Leur présentation et leurs actes révèlent toujours celui ou celle à qui elles appartiennent.

Les mains sont un outil merveilleux à mettre entre toutes les mains !

 

 

Considérons le développement neuro-fonctionnel du bébé.

Durant les premiers mois de sa vie, l’enfant se sert de sa main fermée ou ouverte pour agripper et tenir.

Il affine ses fonctions digitales vers le 6ème mois en écartant les doigts, puis les bras et les poignets sur lesquels il prend appuis afin de stabiliser une posture assise puis à plat ventre. Il commence à adapter sa posture à la gravité. Il a 8/9 mois.

Puis il devient capable de se déplacer à 4 pattes, et en même temps, d’utiliser son pouce en l’opposant aux autres doigts (pince pouce-index en premier lieu). Il a 12 mois.

Lorsque ces étapes sont franchies, l’enfant se verticalise et marche seul, sans appuis, sans soutien, les mains libres. Il devient alors capable d’utiliser ses mains consciemment, comme par exemple prendre un jouet et le déplacer ou le jeter au sol.

Cette période de la vie correspond au passage d’une activité uniquement réflexe à une activité qui mettra en jeu le cortex cérébral, donc l’intelligence.

Il est dit que l’homme est intelligent parce qu’il a une main et parce qu’il est doué de la préhension entre le pouce et l’index.

 

Quelques mois plus tôt, ce bébé était un embryon de quelques millimètres de long et quelques jours de vie. Sa forme était celle d’une graine de haricot avec une extrémité ronde, le pôle céphalique qui deviendra la tête, et, une extrémité plus effilée, le pôle caudal qui deviendra le bassin. L’embryon, à son début, est quasi exclusivement constitué de tissus neurologiques, on l’appelle le tube neural. Il est dans une poche translucide, en relation directe avec un état de perfection absolue.

A proximité du pôle céphalique vont germer deux bourgeons qui deviendront les mains ; elles se forment complètement avant que n’apparaissent les poignets puis le reste des bras jusqu’aux épaules. Elles sont l’émanation directe du cerveau qui les construit parce qu’il en a besoin.

Elles restent toute la vie directement connectées aux centres supérieurs du cerveau. Elles peuvent être comparées à un groupe d’interventions spéciales en lien direct et permanent avec le grand directoire.

Il existe d’ailleurs une projection cartographique du corps humain sur son cerveau. Tant sur l’aspect sensibilité que sur l’aspect motricité, la surface représentée par la main est plus importante que celle représentée par la tête et n’est pas loin d’atteindre la moitié de la surface du corps ; le pouce a la part prépondérante.

Si l’on considère que le tube neural est un état de perfection absolue, la main de l’Homme est un faisceau de connexion directe à très haut débit avec sa source créatrice.

 

Le chemin parcouru depuis la forme parfaite que nous étions en vie embryonnaire, nous a fait utiliser des voies expérimentales, des autoroutes de facilités ; la vie nous a soumis à nos émotions et à celles des autres, nos pensées se sont encombrées de la paresse et des préjugés, moteurs de nos égoïsmes et du conventionnel.

La main n’est pas en reste pour nous soumettre aux vices et aux passions car les doigts ont une grande sensibilité tactile ; ils se trouvent à l’origine des voluptés charnelles tel le toucher électrique de l’amour passion, le port ostentatoire d’un bijou, la recherche de l’argent et des biens matériels.

Nos pensées comme nos mains perdent ainsi en se chargeant du passé leur fluidité naturelle.

Cela veut dire que nos pensées, comme nos mains sont liées à notre histoire familiale et personnelle, à notre schéma parental et social.

 

Cependant, l’homme est libre.

La liberté prend ici toute sa dimension quand le chemin commence dans la caverne utérine, pour se prolonger dans les différentes étapes de la vie.

En fait, l’homme n’est plus libre, c’est l’enfant qui l’est.

Pour se retrouver, l’homme devra descendre dans les méandres de son inconscient. Cette descente est un chemin ardu, une « route angoissante ». Elle nous met en lien avec la dimension temporelle du Présent, du Maintenant.

Elle induit une renaissance qui s’inscrit dans un renouvellement quotidien. Le passé devient un outil de connaissance de soi qui vient alimenter notre futur.

Nous pénétrons dans la profondeur de notre être réel pour devenir accoucheur de nous même.

 

Il est paradoxal que cette maïeutique se fasse avec les mots chemins, route, pas, et d’autres encore évoquant le pied. Il est paradoxal qu’elle utilise la parole et donc la langue, que ce soit sur le divan du psychanalyste ou bien dans tout autre lieu.

 

Cependant, ce sont bien les mains qui façonnent notre construction et notre naissance. On comprend leur importance dans la mise en route de ce travail, et la sacralité à accorder aux mains qui nous guident.

 

Le Psaume 24 dit :

« Qui gravira la montagne du Seigneur ou se tiendra à la sainte place ? Celui qui a les mains propres et un cœur pur. »

Le fait de se laver les mains est un préalable à certains actes de la vie ; il l’est à certains rituels.

Avoir les mains propres est en rapport avec le travail de renaissance et signifient le fait qu’elles actent nos pensées de façon authentique.

 

Si l’on veut une preuve de leur caractère sacré, il faut regarder la paume de ses mains…

Trois lignes se retrouvent constamment à gauche comme à droite : une courbe qui part environ 2 cm en dessous de la base de l’index et contourne la masse musculaire du pouce (éminence Thénar) pour se terminer vers la ligne médiane du poignet ; une seconde qui part à peu prés au même endroit que la précédente et se dirige vers le milieu de la masse musculaire dans le prolongement du 5ème doigt (éminence hypothénar) ; une troisième émerge entre le 2ème et le 3ème doigt et se dirige vers la base du 5ème doigt, environ 1,5cm en dessous. Elles sont particulièrement prononcées lors de la flexion des doigts.

Lorsque nous mettons nos mains face à face, nous réalisons que ces lignes sont en miroir et que les paumes concaves réalisent deux miroirs paraboliques.

Nous savons que les miroirs paraboliques captent des faisceaux de lumière.

Dans la tradition islamique, le dessin de ces 3 lignes courbes représente des nombres sacrés désignant les noms divins.

Rappelons-nous que c’est à la recherche de nous même que sommes ; nous cherchons notre essence, notre être essentiel.

 

Acceptons l’idée que nous pouvons donc capter la Lumière entre nos mains. D’autres l’ont fait avant nous, dont un certain Rodin avec une œuvre majeure qui représente deux mains qui s’approchent face à face, les doigts vers le haut, légèrement croisées en oblique, œuvre nommée « la cathédrale » !

Acceptons que cette Lumière puisse nous envahir et éclaire notre chemin.

Et pourquoi ne pas penser que ce rapprochement des mains est à l’évidence un geste de prière.

Remarquons également les représentations sacrées tels les icônes : les mains des divinités et des saints sont extrêmement longues et fines, ouvertes, parfois porteuses du Livre ou d’un autre symbole. Elles indiquent un sens, une direction et tracent dans l’espace le code caché du message sacré.

Au plafond des loges du Vatican, Raphaël a représenté Dieu avec ses mains lorsqu’il crée le monde.

Sur le plafond de la chapelle Sixtine, Michel-ange représente la création d’Adam par le contact de la main de Dieu.

 

Remarquons encore que les plus anciens témoignages de l’activité picturale humaine sont des empreintes humaines en négatif ; ce sont des contours de mains sur des parois de certaines grottes du paléolithique.

 

Dans l’initiation au Zen en extrême orient, les mains sont unies avec les bras croisés appuyés sur le plexus au centre du corps pour recueillir les forces cosmiques, les paumes des mains sont dirigées vers le haut dans la prière.

 

Dans le Bouddhisme, la main droite prend à témoin l’ascension de Bouddha vers le ciel et la main gauche est tournée vers la terre et en rapport avec la mendicité.

 

Dans le Soufisme, pour les Derviches Tourneurs la danse sacrée s’effectue avec une paume tournée vers les astres, l’autre en direction du sol ; le corps devient ainsi un pivot entre le ciel et la terre, sa rotation permet pendant ce rite extatique d’atteindre la conscience de dieu et la communion spirituelle.

 

Enfin, la Maçonnerie permet, par la chaîne d’union de mettre en relation les participants d’une loge et symboliser une œuvre de fraternité universelle.

 

De toute évidence, chaque main est différente et signe une identité propre à l’individu. Chaque ligne de main, chaque volume ou forme qui la dessine, permettent d’établir une empreinte digitale, des traits de caractères acquis et leur modifications périodiques, zodiacales par exemple.

Enfin, chacun des cinq doigts de la main correspond à un symbole particulier : le pouce (doigt de Vénus) est lié à la tête et correspond aux signes de vie ou de mort des romains. L’index (doigt de Jupiter) désigne et accuse. Le médius (doigt de Saturne) est le doigt du milieu, c’est à dire le doigt de la médiumnité. L’annulaire (doigt du soleil) est celui qui porte l’alliance. L’auriculaire (doigt de Mercure) est lié au cœur et à l’inconscient (mon petit doigt m’a dit…).

 

 

Après sa dimension sacrée et maïeutique, considérons la main et sa fonction sensorielle.

Sa complexité anatomique et physiologique lui permet une action motrice fine et particulière (29 os – 40 muscles), mais aussi et surtout sa richesse en récepteurs de la sensibilité et leur connexion directe aux centres supérieurs du cerveau en fait l’organe du toucher.

Le toucher a quatre aspects de perception de la réalité : La forme qui est volumétrique, la densité qui est la forme intérieure à la structure, le nombre qui diversifie et enrichit la forme, le mouvement et le repos en rapport avec la respiration.

 

De nos cinq sens, seuls la vue et le toucher sont objectifs. L’essence du TOUCHER est de regarder, et celle du REGARD est de toucher.

L’objectivité est un consensus subjectif ; il suffit donc que deux personnes accordent leur subjectivité à propos d’un élément pour créer un élément objectif. L’objectivité scientifique est crée par un groupe d’humains qui ont accordé leur subjectivité pour affirmer quelque chose ; l’Histoire nous prouve que cette objectivité est changeante.

Prenons deux exemples par rapport à la densité :

  • La table est dure, dit mon œil, parce que ma main l’a éduqué. Ma main ne peut donc modifier son aspect.
  • Le karatéka brise une brique avec sa main parce que son œil a modifié son approche subjective.

Dans ces exemples, la dureté a deux réalités objectives ; il suffit qu’à chaque fois, vue et toucher s’accordent.

 

Cela paraît simple mais n’explique pas vraiment comment les mécanismes du toucher sont mis en route et utilisés par l’ostéopathe. En voici une description.

 

Le toucher qui guérit est au cœur de cinq fonctions.

La première consiste à percevoir et écouter ; elle utilise les capacités de perception tactiles superficielles et profondes des doigts et des paumes. Des récepteurs neurologiques transmettent ici des messages directement aux centres supérieurs du cerveau. L’écoute manuelle est le temps de travail qui fait le diagnostic ostéopathique.

La seconde est celle de l’analyse et de la traduction des messages. La culture médicale et sa connaissance sont celles de l’anatomie et de la physiologie. Le médecin peut dés lors expliquer les parties du corps en souffrance, comprendre les mécanismes des perturbations et l’historique de leur mise en place.

La réponse doit ensuite être structurée. C’est la troisième fonction que l’on appelle intention. La pensée met en place un processus thérapeutique. Le geste thérapeutique est en même temps dans la tête et dans les mains.

Paradoxalement, la quatrième fonction consiste à savoir ne rien faire. C’est un aspect extrêmement difficile à maîtriser pour un médecin dont les longues études lui apprennent à décider et agir. Ne rien faire permet à cet instant précis du traitement, la réaction des tissus du sujet. Cette expression va dire si la main est juste ou non.

Il s’établit ainsi un dialogue entre la main du soignant et les tissus du soigné. Ce dialogue est la cinquième fonction du toucher. Il est à l’interface des quatre premiers. Sa maîtrise conduit le traitement vers la guérison.

Les mains du thérapeute sont de cette façon à l’interface de deux êtres, leur structure comme leurs fonctions.

 

 

En conclusion, retenons la fonction sacrée de la main et ses fonctions neuro-fonctionnelles complexes, sa position d’interface entre le matériel et l’immatériel, entre la pensée et les actes.

Retenons qu’elle est un outil de travail et de façonnage de notre être profond.

Les mains sont un merveilleux outil de créativité : du peintre au potier, du sculpteur au maçon, du chef cuisinier au tourneur sur bois, du jardinier à l’écrivain, du musicien au guérisseur,… de l’enfant au vieillard, elles animent et révèlent la lumière en toutes choses.

Dans notre métier de soignant, elles sont un outil thérapeutique.

 

 

 

 

 

 

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