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Stress et sentiment d’abandon.

Les situations de stress d’un enfant prennent parfois des dimensions dramatiques, c’est le cas de Rémi, 2 ans. Il vient à ma consultation accompagné par ses parents adoptifs.

 

Nous n’avons aucun renseignement sur la naissance ainsi que sur les parents biologiques de Rémi.

Simplement cet enfant décline sa vie de colères en colères et refuse de manger. Il prend donc peu de poids et son développement commence à accuser un certain retard.

 

Son bilan médical et biologique est normal.

 

De façon surprenante pour un enfant de 2 ans, Rémi s’allonge docilement sur la table et se laisse examiner, docilement, et même passivement !

C’est comme si rien ne l’intéresse. Je crois pouvoir commencer un traitement ostéopathique et rien ne se produit pendant un long moment : aucune sensation de blocage, aucun diagnostic de restriction, aucune tension.

 

J’ai toujours retrouvé ce paradoxe chez les enfants abandonnés.

 

Au premier contact, l’enfant ne montre rien si ce n’est son indifférence.

 

J’ai vécu ce paradoxe en traitant les enfants d’un orphelinat au Cambodge. Nous étions trois ostéopathes à travailler, et, à la fin de la première journée de consultation, nous avions tous les trois des bilans ostéopathiques quasi normaux et satisfaisants.

Les enfants défilaient sous nos mains avec un sourire et de grands yeux tristes, nous remerciaient et repartaient.

J’ai décidé alors de reprendre le travail en centrant notre attention uniquement sur les zones émotionnelles du corps.

 

Ce fût une énorme surprise : immédiatement la sensation d’un volume sans forme organisée, avec la consistance d’une pierre (tombale ?), venait entre les mains.

Dans le même instant la respiration de l’enfant devenait superficielle, voire haletante.

 

Le traitement a consisté à contrôler et tenir cette forme jusqu’à ce que la respiration de l’enfant redevienne normale et apaisée, jusqu’à ce que cette densité disparaisse.

Souvent, à la fin du traitement, l’enfant s’endormait.

 

C’est donc cette même expérience qui m’a aidé à traiter Rémi.

Désormais, il réclame lui-même un traitement régulièrement.

Onze ans plus tard, l’approche de la puberté a créé les conditions d’une nouvelle naissance.

Sa souffrance primitive s’est réinstallée.

 

J’ai alors utilisé la verbalisation, tout en conservant le contact entre mes mains et sa tête, comme avec Florent, m’adressant ici directement à Rémi. Je lui ai demandé de me parler de sa naissance.

Son silence interloqué a été accompagné dans mon toucher par la transformation d’une sensation amorphe et dense comme une pierre en celles de tentacules animés.

Puis il a parlé, comme s’il racontait un vieux rêve…

 

Les mouvements paradoxaux sous mes mains se sont arrêtés et Rémi s’est endormi.

Il a demandé les jours suivants à visiter son Pays natal.

 

 

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L’enfant qui refusait de manger…

Inès est arrivée à la consultation aujourd’hui. Elle a deux ans et demi. Sa maman l’accompagne et me parle d’une enfant qui mange peu et de moins en moins depuis plusieurs mois.

Inès est petite, timide mais présente ; elle accepte le contact et semble touchée lorsque je lui dis bonjour et la complimente sur ses vêtements, ses cheveux. Elle a une apparence sérieuse, trop, et renvoie une image plus âgée que la réalité.

Par rapport à son problème médical, je constate simplement un léger aplatissement de la courbe de prise de poids sur les trois derniers mois. L’ensemble du bilan médical et pédiatrique est normal ; un examen biologique est également normal. Sa maman me signale simplement une succession d’infections rhino-pharyngées dont le cycle est arrêté après un traitement homéopathique.

Mes tests cliniques médicaux, neuro-fonctionnels et ostéopathiques sont normaux.

Lorsque je touche la tête d’Inès et la prend dans mes bras, je ressens une immense angoisse et j’ai l’impression d’être aspiré vers le bas. Une sensation morbide m’envahit. Sous mes mains, les centres émotionnels de son cerveau sont anormalement en tension. A mes questions, la maman d’Inès ne me signale aucun deuil dans la famille depuis sa grossesse et la naissance d’Inès.

J’interroge Inès avec mes mains, un dialogue dans l’inconscient se met en place.

C’est alors qu’apparait dans ma pensée l’image de sa petite sœur, née alors qu’Inès avait 18 mois. Et je comprends la jalousie d’Inès, sa souffrance, sa peur de ne plus être le centre de la famille, ses angoisses lorsque son papa et sa maman s’occupent de « l’autre », et la délaissent. Je comprends son envie de la jeter à la poubelle, de la taper, de s’en débarrasser pour que tout soit comme avant…. Et je le dis, à Inès, à sa maman ; j’explique que la jalousie de l’aîné d’une famille est quelque chose de normal, de physiologique. Ce quelque chose est une émotion qui fait sécréter des hormones en rapport avec la peur et la colère ; les centres émotionnels du cerveau sont en tension car très sollicités, l’enfant peut même déprimer.

En l’occurrence, Inès crée un conflit alimentaire, entre en compétition avec sa sœur, et il faut le désamorcer tout de suite afin d’éviter une dérive anorexique, et un conflit familial.

Certes la technique ostéopathique crânienne et sa composante biodynamique prend ici sa place pour traiter Inès, mais la verbalisation de ces attitudes concourt à la détente de l’enfant dont le regard et le sourire montrent qu’elle est heureuse d’avoir été comprise.

J’explique que le comportement d’Inès, ses gestes vifs envers sa sœur ne sont qu’appel à l’aide pour trouver sa place, comme avant, même si c’est impossible. Et je dis surtout que la seule réponse à donner à Inès est un câlin, un geste et des mots d’amour, et que le seul fait de dire à l’enfant quelque chose qui ressemble à « je comprends ce que tu veux me dire, je t’aime et je vais t’aider » suffira à régler ce conflit immédiat.

Oui, j’affirme que le vrai dialogue amoureux est thérapeutique. Je l’ai à nouveau senti dans mes mains aujourd’hui.

 

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une naissance déclenchée suivie d’une extraction par forceps.

 

Beaucoup de traitements ressemblent à celui de Florent, décrit précédemment. C’est le cas de Mathilde venue à ma consultation à son 8ème jour avec ses parents pour les mêmes raisons que Florent. Pour Mathilde, la naissance avait été difficile car il avait fallu déclencher les contractions utérines. La dilatation du col s’était faite lentement. Le passage du bébé avait nécessité l’aide d’instruments (forceps) afin de limiter sa souffrance.

Quoiqu’il en soit Mathilde souffre physiquement. La puissance des contractions, la lenteur du passage, l’angoisse de l’entourage, la mettent mal à l’aise. Elle a mal à la tête, au dos, au ventre, respire vite et à l’envers. Donc, elle pleure beaucoup, dort peu, ne trouve pas de position de repos, mange et digère difficilement.

Mathilde cumule deux interventions sur le déroulement de sa naissance : le déclenchement et les forceps.

Le déclenchement (d’autant plus négatif s’il n’y a pas d’indications médicales ou chirurgicales) induit chez l’enfant l’idée que rien ne va, la sensation d’être tout le temps interrompu et contrôlé.

Les forceps induisent un fonctionnement mental du type de « je ne peux pas y arriver par moi-même », et des douleurs de tête, de nuque et des épaules.

(Soyons clair, il n’est pas dans mon propos l’intention de critiquer une attitude et un geste obstétrical ; ce qui a été fait l’a été pour le bien de la mère et de l’enfant ; les forceps leur sauvent la vie ; j’en évoque simplement les conséquences.)

Le traitement paraît simple : il faut compacter les tissus comme pour Florent. Toutefois rien ne fonctionne. Mathilde pleure à chaque fois que je la touche. Elle refuse le traitement. Je sens ses tissus, son corps, se bloquer sous mes mains comme si une armure d’acier la recouvrait et l’envahissait.

C’est alors que j’ai l’idée de changer le décor et le scénario. Quelque chose d’imprévu se passe, il faut créer l’inattendu.

Je propose donc au papa et la maman de Mathilde de s’asseoir côte à côte sur la table de travail et dépose Mathilde dans les bras de sa maman.

L’enfant est ainsi contre le sein de sa mère, baignée d’odeurs rassurantes. Son papa pose sa main sur son dos et lui parle.

Je suis derrière la maman et prends un léger appui contre son dos par l’intermédiaire d’un coussin. Mes mains recouvrent la tête de Mathilde. Elles effleurent à peine les cheveux. Mathilde pleure toujours, elle hoquète.

Ma perception est toujours celle d’une armure en acier, comme si mes mains tenaient fermement cet objet.

Cependant je la touche comme une plume posée sur l’eau. Mathilde se défend toujours tant sa souffrance de naissance est forte………

 

Il a fallu du temps, beaucoup de temps ! Il a fallu tout l’amour des parents de Mathilde pour aider à traverser ce temps. Il a fallu toute ma confiance et ma certitude que sous l’armure, les tissus du corps de Mathilde attendaient cette délivrance.

L’armure représente ici toute la contracture et les blocages de cette naissance, tant sur le plan physique que sur le plan émotionnel.

Elle représente aussi toutes les défenses fabriquées par Mathilde pour arrêter de souffrir.

Enfin, au bout de tout ce temps, Mathilde s’est détendue progressivement, plusieurs profonds soupirs ont calmé ses hoquets et ses pleurs. Elle s’est endormie.

Plus rien ne bougeait. Le temps s’est arrêté. C’était comme lorsque plusieurs personnes sont réunies, discutent, parlent, échangent, jusqu’à l’instant de silence inattendu, imprévu, et que chacun remarque en pensant au fond de lui-même… « Un ange passe » !

Enfin, la respiration de Mathilde devenait calme et sereine ; enfin, je pouvais la toucher sans l’agresser. Elle réclamait le sein de sa mère et pendant son repas, la conversation a permis de mettre des mots sur ce qui s’était passé.

Mathilde a réalisé sa capacité de réaction dans des situations difficiles, et sa confiance en son corps dans ces moments-là. Sa maman a compris qu’elle n’était en rien responsable de tout ce qui était arrivé.

J’ai apprécié ce travail et je remercie les parents de m’avoir ouvert cet espace d’amour pour que le traitement puisse être efficace.

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Le bébé qui refusait sa naissance

Voici l’histoire de Florent venu à ma consultation à son 7ème jour.

Il vient avec son papa et sa maman. Le motif de l’appel est : « pleurs et cris incessants ».

De fait, mis à part les premières 24 heures, Florent est sans arrêt en cris et en pleurs. Le calme revient un peu pendant les repas. Le bilan médical à la maternité est normal.

Devant cet enfant que rien ne console et ne calme, très vite, les parents sont désemparés… les voisins mécontents !

L’appel téléphonique de la maman est un appel au secours, débordant d’angoisse et de désespérance.

 

L’arrivée de Florent au cabinet est remarquée car très bruyante. Bref, cet enfant semble très en colère.

L’examen médical et l’examen ostéopathique ne révèlent aucun problème particulier. Il n’y a pas de contraintes crâniennes pouvant expliquer un mal de tête, tout au plus, une tension dans la nuque et le haut du dos.

Je commence alors un traitement par rapport à cette tension, et, quel que soit la position de mes mains, quel que soit la posture du bébé, rien ne se passe. Florent est toujours pleurant et hurlant.

Il arrive un instant où je commence à penser que je ne vais rien pouvoir faire pour cet enfant.

Je suis assis à califourchon sur ma table de travail, c’est ma position préférée pour traiter les enfants. Florent est dans mes mains, je le porte, une main sous la tête, l’autre sous le bassin. Il me fait face.

Ses parents sont assis à côté. Ils ont un contact permanent avec lui.

C’est alors que je demande à nouveau à la maman de raconter la naissance.

C’est avec une sorte de « cri du ventre » qu’elle répond du tac au tac : « de toutes façons il ne voulait pas venir, il a fallu aller le chercher » !

Instantanément, mes mains ont perçu comme une rétraction des tissus du bébé, comme si Florent avait envie de se recroqueviller. Il entend les paroles de sa maman et sa réponse est faite en langage corporel.

Mes mains ont suivi ce mouvement de rétraction dès sa perception. Elles se sont rapprochées. Très vite, Florent s’est compacté, tassé sur lui-même. Ce mouvement a imposé un demi-tour de telle sorte que le bébé se retrouve collé contre moi, son dos contre mon ventre. Ma main sur sa tête a quasiment rejoint ma main sur son bassin. Autant que les tissus l’autorisent, j’accompagne ce mouvement de compaction.

Au bout de quelques secondes, cet enfant qui criait et pleurait depuis sa naissance, cet enfant inconsolable, s’est tu… et s’est endormi…

Je ne sais combien de temps a duré cet instant d’immobilité. Nous l’appelons en ostéopathie « Still point ». Je sais seulement qu’il fallait attendre et ne rien faire. Je me rappelle le regard du papa et de la maman ; je sais qu’ils ont pleuré de soulagement.

Je ressens toujours une grande émotion lorsque je raconte cette histoire.

Pendant cette période d’immobilité, Florent a résolu sa colère. C’est vrai, il ne voulait pas venir. L’avoir forcé avait déclenché son refus. Sa rage se déversait sur tout ce qui l’entourait.

Avoir accompagné physiquement ses émotions dans une compaction tissulaire lui a permis de trouver une autre respiration. C’est un peu comme s’il se réconciliait avec le monde.

Lorsque cet instant d’immobilité et de calme est arrivé à son terme, j’ai senti entre mes mains l’enfant se détendre complètement, un bras, une jambe, puis les quatre membres se sont relâchés. Florent s’est progressivement réveillé. Il m’a regardé au fond des yeux.

Le traitement était terminé, il pouvait revenir dans les bras de ses parents et accepter sa naissance.

Je crois que cet enfant a beaucoup de caractère. Il est très volontaire et ne mâchera jamais ses mots dans la vie.

Sa croissance sera libre et sans contrainte car le refus d’être né s’est transformé dans l’apaisement d’être accueilli.

 

 

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Ostéopathie autour de la prime enfance et de la grossesse (1).

La grossesse, le travail et la délivrance sont des évènements physiques à la fois pour la mère et l’enfant.

L’ostéopathie est un art de médecine manuelle qui possède un potentiel pour traiter les problèmes physiques associés à ces événements.

Essayons de comprendre pourquoi.

Selon un principe ostéopathique de base, le corps humain ne peut pas fonctionner normalement si même une de ses infimes parties, n’est pas correctement structurellement constituée.

De la même façon le corps travaillera toujours pour retrouver de façon autonome son état de santé initial.

Tous les événements importants survenus au cours de nos vies, qu’il s’agisse de traumatismes physiques ou psychiques, de maladies graves, de traitements médicamenteux importants, sont inscrits sous forme de mémoire et/ou de contraintes à l’intérieur de notre corps.

La plupart du temps le corps s’adapte à la plupart des stress qui lui sont imposés sans manifester aucun symptôme. Cependant, après un temps plus ou moins variable, ou bien après une accumulation des différents stress imposés, il ne peut plus s’ajuster et des symptômes peuvent alors apparaître.

Cependant la cause originelle du problème peut être survenue un long temps auparavant. La naissance, une chute ancienne, par exemple, sont des événements qui engrènent un stress dont la symptomatologie peut apparaître beaucoup plus tard dans la vie.

Nous allons considérer la grossesse, le travail et la délivrance et examinons comment le corps est capable de s’adapter et ce qui arrive lorsqu’il ne le fait pas.

Ce sera le thème de trois articles à paraître.

 

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