Spécificités pédiatriques
Cet article fait suite à une première définition parue dans la rubrique « repères » de mon site : Le praticien de santé et le consentement.
Les définitions et principes y sont exposés. L’objectif est ici de tracer un cadre pour ce qui est de l’ordre du consentement en pédiatrie.
Par principe, compte tenu du développement psychomoteur et neurologique, il ne peut y avoir de consentement chez un enfant, au sens où il est compris chez l’adulte. Un enfant n’est pas en possession de l’altérité indispensable pour penser par soi-même. …Toutefois, en matière de santé, il est nécessaire de trouver une solution.
Pour évoquer le consentement chez un enfant, la question primordiale est « qu’est-ce qu’un enfant ? ». Nous n’avons pas la même personne s’il s’agit d’un nourrisson, d’un enfant en dessous de trois ans, jusqu’à sept ans, et enfin un adolescent. Cependant, il est nécessaire de définir une règle générale et applicable à tous les âges.
Afin de connaître le texte de la loi, je vous propose de consulter ce document : INFORMATION ET CONSENTEMENT AUX SOINS D’UN MINEUR.
Clairement, le consentement parental, ou de la personne responsable et majeure, est indispensable et lui donne la place de protecteur. Toutefois, il ne doit pas être considéré comme suffisant. La personne soignante a le devoir de parler, d’expliquer en s’adressant tant aux parents qu’à l’enfant.
Cela permet de comprendre que sa réponse n’est pas forcément en accord, et, tout praticien de santé, médecin ou non, se doit d’apprendre à décoder le langage verbal et corporel d’un enfant. Ce langage est universel et s’installe dans une intercommunication entre les protagonistes de la consultation.
Avant toute chose, la personne soignante doit parler à l’enfant, y compris au nourrisson, avec des mots simples, concrets et clairs ; le langage métaphorique peut être utile mais pas systématique. Il est adopté afin d’apporter un éclairage complémentaire à une proposition thérapeutique.
Cette personne doit également être attentive à toutes les réactions en provenance de l’enfant. Un mouvement du corps, des yeux, une réaction respiratoire, des cris, un sourire, etc…sont une réponse.
Comment l’interpréter ? Ma proposition est d’en décoder les significations à l’aide de la compréhension du fonctionnement du système nerveux autonome, ou neuro-végétatif du corps. Le système neuro-végétatif est la partie du fonctionnement neurologique qui s’adresse au maintien des fonctions intérieures du corps, en participant à un équilibre neuro-hormonal, proprioceptif, et globalement, à la gestion du stress.
Il est parfois considéré comme une tripartition d’une organisation nommée système poly vagal (SPV). Cette théorie n’a pas de preuve scientifique ; elle est cependant approuvée et utilisée dans le domaine des psychothérapies psychocorporelles.
Sources : La théorie polyvagale – Fondements neurophysiologiques des émotions, de l’attachement, de la communication et de l’autorégulation – Stephen W. Porges – Collection QuinteSciences / octobre 2021
Dans toutes les situations de la vie, le SPV réagit par l’intermédiaire de trois supports.
- Le système orthosympathique : il est sécréteur d’adrénaline, et gère les réactions immédiates, notamment au stress. La réponse consiste en mécanismes de fuite ou d’attaque, de colère, de peur, etc., …
- Le système parasympathique dorsal : ses sécrétions hormonales sont noradrénergiques. Lorsqu’elles sont en quantité élevée, elles provoquent une inertie tissulaire et liquidienne, qualifiée de figement. C’est l’état dans lequel se trouve une personne agressée, comme un lapin pris dans la lumière des phares d’une voiture.
- Le système parasympathique ventral est celui qui est activé lors des états de bien-être, avec la sensation que tout est juste. Les sécrétions hormonales dominantes sont sérotoninergiques et dopaminergiques.
Par conséquent :
- Une réaction orthosympathique qui met en jeu les fonctions adrénergiques, donc de stimulation, est un refus de consentir.
- Une réaction parasympathique dorsale qui met en jeu des fonctions noradrénergiques dans les zones postérieures du corps est une réaction de figement, d’inertie physiologique, donc de stress ; là encore, il s’agit d’un refus net.
- Enfin, une réaction parasympathique ventrale, sécrétrice de sérotonine, de dopamine, voire d’ocytocine, qui induit une détente complète du corps et un état de bien-être, est une réaction signifiant le consentement.
Grâce à l’éclairage apporté par cette analyse neurophysiologique des réactions du SPV d’un enfant, il appartient à toute personne soignante d’apprendre et d’être à l’écoute du langage corporel.
Il m’est impossible de conclure cet article sans évoquer les situations de toucher interne, que ce soit en intra-pelvien (vaginal ou anal) ou en intra-buccal. Si les principes de consentement sont les mêmes que ceux décrits ci-dessus, ces gestes sont exclusivement réservés aux professionnels de santé médecins, exclusivement dans le cadre de leur domaine de compétence, et uniquement si ce geste est indispensable à la sauvegarde de la santé de l’enfant. Un geste de cet ordre, pratiqué par une personne qui n’est pas médecin, ou pratiqué sans le consentement de l’enfant, est à bannir car considéré comme une violence sexuelle.
En conclusion, je rappelle les adjectifs encadrant un consentement, cités dans le précédent article. Ce sont les mêmes et ils s’appliquent ici chez l’enfant concerné par le soin comme chez le parent protecteur accompagnant l’enfant.
- Le consentement doit être réversible.
- Il doit être éclairé.
- Il doit être accompagné d’enthousiasme.
- Bien évidemment, il est libre.
- Il sera toujours spécifique.
Dans ce contexte, si en lisant ces lignes, vous souhaitez aller plus loin et approfondir votre réflexion, je vous propose l’écoute de cette conférence de Hélène Romano : La notion de consentement chez l’enfant (Extrait d’un colloque proposé par Association CDP-Enfance).